La cadence s'intensifie

Demain, jeudi 4 avril, les accusés dans l’affaire ONDA retrouveront leurs juges de la Cour d’appel de Casablanca. Au menu, audition des mis en liberté provisoire.  

La cadence s'intensifie

Le 3 avril 2013 à 17h15

Modifié 3 avril 2013 à 17h15

Demain, jeudi 4 avril, les accusés dans l’affaire ONDA retrouveront leurs juges de la Cour d’appel de Casablanca. Au menu, audition des mis en liberté provisoire.  

A l’issue de l’audience de ce mardi, Abelhanine Benallou, ex-directeur général de l’ONDA, Amine Berkallil, son  chef de cabinet et Ouadi Mouline directeur financier de l’établissement, sont retournés dans leurs cellules, sous le regard désespéré des familles et amis présents. Les juges de la Cour d’appel de Casablanca ont décidé de poursuivre les débats ce jeudi.

Durant la séance de ce mardi 2 avril, le procureur du roi a prononcé un plaidoyer en guise de réponse aux griefs de la défense exposés le 21 mars dernier. Il a organisé son argumentaire autour de la légalité des expertises ordonnées par le procureur général du roi, dans le cadre de l’instruction. Lesquelles expertises sont remises en cause par les avocats des accusés.

Toujours sur la base de dispositions légales, ces derniers avancent l’absence d’experts mandatés par la défense pour participer à ces expertises. De plus, il ne leur a pas été notifié la fin des enquêtes d’expertise, comme le voudrait la procédure en vigueur. « On ne les connaît pas », lance aux juges Me Saleh Fodda, avocat de Abdelhanine Benallou. Et d’ajouter :   « l’un des experts, Hannach était un employé de l’ONDA et son animosité envers l’ancien DG de l’Office est de notoriété publique ». Un rappel à l’ordre sec du président du tribunal : « Nous ne discutons ici que de la forme ! »

Autre point : l’absence du respect du secret de l’instruction. « Il n’y a pas eu de fuites», réplique du haut de son perchoir, le représentant du ministère public. Argument contre lequel la défense avance la preuve de la diffusion par la presse d’informations durant l’enquête.

Irrégularités dans les recrutements?

S’en est suivie l’audition de l’un des accusés en liberté provisoire, Abderrahim Boutaleb, ex-directeur des ressources humaines de l’Office. Il lui est reproché des irrégularités dans le processus de recrutement ainsi que l’octroi des primes (lire encadré). Ce dernier a clairement laissé entendre qu’il ne détenait pas la décision finale dans l’embauche, mais qu’en revanche, Abdelali Falouhi, l’agent comptable, imposait souvent des nouvelles recrues. L’ex DRH de l’ONDA dit disposer de preuves. « Je n’étais pas maître de mes décisions. Ma délégation ne comprenait pas la décision de recrutement. Je ne signais pas l’accord d’embauche », affirme-t-il aux juges. Ces derniers lui ont soumis des dossiers entachés d’irrégularités. Abdelhanine Benallou détenait la décision finale dans le recrutement, mais selon Boutaleb, l’ancien DG cédait aux pressions de Falouhi. Boutaleb raconte s’être indigné de tels agissements auprès de la direction générale, mais en vain. Le frère et la sœur de Falouhi sont salariés de l’Office.

Il est vrai qu’un certain trouble entoure la libération de Fahouli et ce depuis l’audience du 21 mars dernier. Quel a été son vrai rôle dans ce feuilleton et où se trouve-t-il actuellement? Il est fréquemment cité par l’accusation ; pourtant, les juges n’ont toujours pas demandé sa comparution. Pour la petite histoire, ce contrôleur général dépêché par le ministère des Finances, a des liens de parenté avec Fathallah Oualalou, qui est son beau-frère, argument utilisé en off par l’entourage de Benallou. Ce « pouvoir », décrit par l’accusation, le doit-il à cette alliance avec un ex ministre des Finances ? Une chose est sûre, sa libération intrigue.

Si des hommes comme Benallou, Ibrahimi, Alioua, et avant eux les frères Haddaoui sont placés à la tête d’établissements publics, ce n’est pas pour modifier l’ordre établi au sein de ces structures mais avec l’objectif non affiché de garantir une certaine continuité… A quel niveau se situerait donc leur culpabilité ?

 

Extraits du rapport 2008 de la Cour des Comptes portant sur la gestion des ressources humaines

Paie

• Manipulation informatique de la paie

La manipulation de la situation administrative de certains agents sur l’application informatique HR Access relative à la paie, sans respect des procédures, constitue l’une des manifestations de l’absence du contrôle interne et suscite des doutes quant à la fiabilité du système d’information et de gestion des ressources humaines.

Plusieurs cas ont été détectés dont le plus frappant est celui de l’agent matricule 4235 qui a bénéficié d’un avancement irrégulier par bonification lui permettant de passer du grade C3 au grade C7, en l’absence de décision du directeur général. Cette seule irrégularité a causé à l’office une perte d’environ 133.602,50 DH que l’intéressé s’est engagé à rembourser.

• Modification des décisions de recrutement et de reclassement après signature du directeur général

Il a été constaté un recours fréquent à la surcharge des décisions de recrutement, par l’utilisation de correcteur, pour modifier la date d’effet ou le grade. Cette pratique a été confirmée par les responsables de la direction des ressources humaines qui affirment y recourir en cas d’omissions ou d’erreurs de saisie ayant entaché des décisions déjà signées par le directeur général.

Cette pratique, avant d’être bannie par la direction générale en 2008, a permis d’avantager indûment plusieurs agents nouvellement recrutés (14 cas détectés).

• Majoration irrégulière de la prime d’encadrement

En vertu de la décision n°7/2006 annexée au statut du personnel, une prime d’encadrement est accordée au personnel de l’ONDA classé dans les échelles 17 à 28, suivant un barème fixé par ladite décision qui prévoit que cette prime peut être majorée ou minorée de 30% par décision du directeur général.

Toutefois, il a été relevé qu’à l’exception de deux cadres dont le montant de cette prime est majoré par décision du directeur général en janvier 2007 (matricules 6109 et 0518), l’examen des états de la paie du mois d’octobre 2008 a permis de relever de nombreuses majorations indûment accordées.

Cette situation fournie par le DRH montre que le trop perçu relatif à ces majorations s’élève à plus de 42.735 DH. Le préjudice causé à l’établissement durant la période 2003-2008 est d’environ 2.500.000 DH.

• Avancement irrégulier

En vertu de l’article 15 du statut du personnel de l’ONDA, « le passage de la catégorie IV à la catégorie V se fait par voie de concours professionnels dont les modalités sont fixées par le directeur général de l’Office ». Or, il a été constaté que de nombreux agents classés au grade H4 sont avancés au grade C1 par ancienneté et non par concours. Il s’agit au total de 13 cas régularisés en juin 2008. Le préjudice financier correspondant est estimé à plus de 80.000 DH.

Primes et indemnités

• Des primes accordées indûment aux contractuels

Les décisions n°25/2006 et 26/2006, annexées au statut du personnel, relatives aux primes de gratification et de performance excluent les agents contractuels des bénéficiaires desdites primes. Néanmoins, il a été constaté que le directeur financier en exercice, agent contractuel, perçoit annuellement ces deux primes malgré que le contrat d’engagement conclu avec l’intéressé ne prévoie pas cet avantage. Ainsi, ce responsable a perçu indûment, de 2006 à 2008, un montant d’environ 565.000,00 DH.

• L’octroi irrégulier de la prime de performance à certains cadres

Outre le fait que la prime de performance a été octroyée au personnel en 2006 avant l’entrée en vigueur en 2007 du nouveau statut qui la prévoit, il a été constaté que certains agents et cadres bénéficient doublement de cette prime en percevant à la fin de l’année une autre prime de performance non prévue par le statut. Celle-ci est puisée dans le reliquat de l’enveloppe réservée à ladite prime.

Abstraction faite de la non-conformité de l’octroi de ce reliquat au statut du personnel qui précise que « cette prime est accordée une seule fois au mois de septembre », cette pratique donne lieu, dans la plupart de cas, à un dépassement du montant dont l’intéressé a droit, soit l’équivalent de deux mois et demi du salaire brut. En outre, du fait qu’elle se limite à une cinquantaine d’agents et cadres sur un effectif total de 2660, cette pratique est devenue source de frustration pour les autres employés de l’Office. Durant ces dernières années, le montant versé au titre de ce reliquat dépasse 3 millions DH.

Perception • irrégulière par certains responsables de l’indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires

Aux termes de la décision n°11/2006 annexée au statut du personnel, une indemnité forfaitaire de travaux supplémentaires plafonnée à 15% du salaire de base, est accordée aux cadres responsables de l’ONDA .

Les investigations menées sur place ont permis de constater que :

• Certains responsables perçoivent cette indemnité en l’absence de décision du directeur général. Il s’agit par exemple des cas des titulaires des matricules suivants : 0520, 0968, 0971, 3497, 3738 et 0983 qui ont perçu, de 2003 à 2007, plus de 200.000 DH

• Certains responsables percevaient cette indemnité depuis des années, et ce n’est qu’à la fin de 2008 que leur situation a été régularisée après la signature d’une décision dans ce sens par le directeur général. C’est le cas du responsable titulaire du matricule n°4011. Le trop perçu est estimé à plus de 30.000 DH.

• Indemnités pour heures supplémentaires versées aux cadres

En vertu de la décision n°34/2006 annexée au statut du personnel, les heures de travail effectuées, en dehors des horaires normaux de service, par les agents classés aux échelles 1 à 16, ouvrent droit au paiement d’heures supplémentaires. Il s’ensuit que les cadres ne peuvent pas bénéficier de cette indemnité.

Toutefois, les investigations sur place ont permis de relever qu’au titre de l’année 2007, par exemple, 200 cadres avaient perçu ces indemnités dont le montant mensuel dépasse 160.000 DH, ce qui correspond à un trop perçu durant les cinq dernières années d’un montant de plus de 8.000.000 DH.

Recrutement

• Non respect des règles de transparence

Aux termes de l’article 5-alinéa 1 du statut du personnel de l’ONDA , « les recrutements ont lieu suivant les postes budgétaires prévus par la loi cadre, et ce, par voie de concours, tests, ou entretiens professionnels ». En l’absence de procès verbaux dûment signés et d’avis de recrutement publiés, il a été constaté que l’accès à l’emploi à l’ONDA se fait dans la quasi-majorité de cas, dans des circonstances non transparentes.

• Absence du contrôle de l’authenticité des diplômes

Conformément au dernier alinéa de l’article 4 du statut du personnel, « toute fausse déclaration, lors de la constitution du dossier de recrutement, peut entraîner le congédiement de l’agent concerné sans préavis ni indemnité, sans préjudice des poursuites judiciaires prévues par la législation en vigueur ».

Cette disposition statutaire n’est pas toujours observée. Les investigations menées sur place ont permis de relever la non authenticité des diplômes et certificats présentés par les agents titulaires des matricules suivants :

9173 Certificat de scolarité, niveau bac M1/01 07/08/2007 82.000

9062 Certificat de scolarité, niveau bac M3/09 18/12/2006 125.000

9151 Certificat de scolarité, niveau bac M1/12 01/01/2007 120.000

8756 Diplôme de technicien (OFPPT) M1/02 01/01/2006 8.000*

9190 Certificat de scolarité, niveau bac et attestation de travail

M4/09 10/09/2007 100.000

* (reclassement)

 

 


 

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