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Le point sur les nouveaux régimes AMO avec Hassan Boubrik, DG de la CNSS 1/2

AMO des TNS, AMO Tadamon ou AMO Achamil... Comment évolue le système AMO avec ses nouvelles composantes ? Nous avons posé la question à Hassan Boubrik, directeur général de la CNSS. Réponse.

Le point sur les nouveaux régimes AMO avec Hassan Boubrik, DG de la CNSS 1/2

Le 21 février 2024 à 19h24

Modifié 22 février 2024 à 13h23

AMO des TNS, AMO Tadamon ou AMO Achamil... Comment évolue le système AMO avec ses nouvelles composantes ? Nous avons posé la question à Hassan Boubrik, directeur général de la CNSS. Réponse.

L'Assurance Maladie Obligatoire (AMO) est désormais disponible pour tous les Marocains, nous affirme le Directeur général de la CNSS. L'objectif de généralisation est donc atteint, du moins sur d'un point de vue réglementaire.

L'Etat a mis en place différents régimes couvrant les différentes catégories possible et donc l'ensemble de la population.

Mais tout l'enjeu est de faire adhérer certaines de ces catégorie au système. Un enjeu fondamental que Hassan Boubrik nous explique en détail dans la première partie de notre échange.

AMO Tadamon a apporté un plus non négligeable à cette population. Je pense que nouveau régime a transformé leur vie

Médias24. Le déploiement réglementaire et opérationnel de l'Assurance maladie obligatoire (AMO) est bouclé. Quel est le taux actuel de couverture de la population ? 

Hassan Boubrik. L'ensemble des textes législatifs et réglementaires qui régissent l'extension de la couverture maladie obligatoire ont été adoptés. Sur le plan opérationnel également, tous les dispositifs sont là. Donc, on peut dire aujourd'hui que l'AMO n'exclut aucun citoyen marocain.

Puisque si vous êtes salarié, vous avez l'AMO des travailleurs salariés. Vous n'êtes pas salarié et vous avez une activité et un revenu, vous êtes éligible à l'AMO des Travailleurs non salariés (TNS). Si vous faites partie de la population vulnérable, vous avez l'AMO Tadamon. Si vous avez la capacité de payer, mais vous n'exercez aucune activité, vous avez l'AMO Achamil qui est déployée depuis le 1er janvier 2024.

Donc, le dispositif global de l'AMO n'exclut personne. Maintenant, ceux qui sont réellement inscrits chez nous sont au nombre d'environ 25 millions de personnes (assurés principaux et ayants droit). Dans ce chiffre, nous avons 11 millions à peu près d'inscrits dans AMO Tadamon, 5 millions d'inscrits à l'AMO des TNS, et à peu près 9 millions parmi les travailleurs salariés.

Cela étant, tout le monde n'a pas un droit ouvert. Notamment sur la partie des travailleurs non salariés, parce que l'ouverture du droit est conditionnée par un paiement des cotisations.

- Désormais, le passage par le RSU et la justification du seuil sont devenus pleinement obligatoires pour bénéficier d'AMO Tadamon. Comment s'est passée la transition ?

- Toutes les personnes concernées par AMO Tadamon passent aujourd'hui par le RSU. Même les ex-Ramédistes qu'on avait basculés fin 2022 automatiquement à AMO Tadamon avaient un délai, au maximum 30 novembre 2023, pour faire leur inscription au RSU, car le maintien du droit était conditionné par ce passage par le RSU. Nous avons fait beaucoup d'actions de communication et de sensibilisation, y compris des actions directes, notamment l'envoi de SMS.

Au passage du 30 novembre 2023, nous avions remarqué une baisse dans le nombre total des assurés à AMO Tadamon. Mais cette situation a été vite rattrapée parce que les gens sont allés se réinscrire dans le RSU.

Ce qui a probablement aidé dans ce sens, c'est qu'entre-temps, le gouvernement a lancé les aides sociales directes, pour lesquelles le RSU est également un passage obligé. En s'inscrivant dans le Registre, ils voient qu'ils ont le score aussi pour bénéficier d'AMO Tadamon et ils vont naturellement faire leur demande sur le portail.

- Est-ce que vous avez remarqué un changement au niveau de la base des assurés par rapport à celle qui a basculé fin 2022 depuis le Ramed vers AMO Tadamon ?

- Il y a certainement eu des changements dans la base. Des entrées et des sorties de personnes dues à une dynamique qui s'explique essentiellement par le dispositif du ciblage. Il ne faut pas oublier une chose, c'est que si le RSU a été mis en place, c'est pour mieux cibler. Le Ramed tel qu'il est, avec le dispositif d'éligibilité et de sélection, ne ciblait pas et on parlait d'un pourcentage non négligeable qui, normalement, n'aurait pas dû bénéficier du régime.

Maintenant, en termes de comportement, clairement, AMO Tadamon a apporté un plus non négligeable à cette population. Je pense que nouveau régime a transformé leur vie. Avant, ils n'avaient que l'hôpital public et ne bénéficiaient pas du remboursement des dépenses de la pharmacie, de la radiologie ou de la biologie, etc. Aujourd'hui, ils ont accès à une prise en charge dans de meilleures conditions, notamment pour les ALD, les maladies lourdes, et ils bénéficient du remboursement des autres frais comme la pharmacie. Donc, c'est une véritable transformation.

Il y a un projet en discussion pour que la CNSS puisse disposer de l'instrument de l'ATD (Avis à tiers détenteur) qui pourra lui donner de l'agilité nécessaire pour un recouvrement à moindres frais.

- Et sur le plan opérationnel, les choses fonctionnement bien ? 

- Oui. Et c'est ce qui importe le plus pour nous. Depuis le début à aujourd'hui, nous avons traité quelque 4,5 millions de dossiers de remboursement AMO Tadamon, auxquels s'ajoutent les 5,3 millions de dossiers facturés directement dans les hôpitaux publics, de manière digitalisée. Si on fait la somme des deux, on est quasiment à 10 millions de dossiers traités en 2023. C'est considérable. Et cela montre que ça fonctionne, que ça apporte une nouvelle valeur ajoutée à tout l'écosystème.

- AMO Achamil est la dernière brique du système AMO. Il a été lancé en janvier 2024. Avez-vous un premier bilan à partager avec nous ?

- Ce régime a été mis en place le 1er janvier. Nous sommes actuellement à 13.500 assurés principaux. Il est trop tôt pour faire un bilan.

- Contrairement aux autres régimes AMO, c'est un régime volontaire à l'entrée. Pourquoi le choix du caractère facultatif ?

- Pour une raison simple, car il est difficile d'assurer l'obligation, sur un plan pratique, de quelqu'un qui ne travaille pas. Sur la catégorie des travailleurs non salariés, nous avons un dispositif avec les organismes de liaison qui nous fournissent les bases de données. Là, nous sommes en présence d'une population qui est complètement hétérogène, non identifiable. Il n'y a pas la possibilité d'avoir un organisme de liaison. Si on met le caractère obligatoire dans la loi, il faut disposer d'outils pour l'assurer. La loi est faite pour être appliquée.

- Pour tous ces régimes, l'enjeu d’enrôlement et de recouvrement des cotisations est majeur. Mais il se pose avec acuité pour les TNS, et ce depuis le début du chantier. Est-ce qu'il y a eu des améliorations depuis ? 

- Dans le régime d'AMO TNS, tout le monde n'a pas un droit ouvert, parce que l'ouverture du droit est conditionnée par un paiement des cotisations. Nous avons encore du travail à faire pour convaincre les gens d'adhérer et de payer régulièrement leurs cotisations.

Il faut d'abord comprendre qu'il y a une raison culturelle sous-jacente. C'est-à-dire que nous ne sommes pas habitués à payer de notre propre initiative une cotisation donnée. Donc, il faut communiquer, sensibiliser, expliquer en quoi c'est important de payer la cotisation, parce que c'est un régime qui fonctionne sur la mutualisation.

La deuxième chose, il fallait aussi crédibiliser et rendre l'AMO concrète pour les gens. Leur permettre de voir que les inscrits bénéficient effectivement de services, de prises en charge, de remboursements, etc. dans de bonnes conditions. C'est un point primordial. C'est pour ça d'ailleurs qu'au début du lancement du régime, il n'y avait pas de délai de stage quand on adhère et qu'il n'y avait pas de délai de carence.

Ce que nous avons remarqué sur cette catégorie, c'est que les gens ne paient la cotisation qu'une fois malades. Parce qu'ils en ont besoin. Donc nous avons mis en place des mécanismes pour répondre à cette problématique de recouvrement. 

Nous allons corser nos moyens de recouvrement.

Une loi a été élaborée et votée pour introduire un délai de carence pour les assurés qui ne paient pas leur cotisation. C'est-à-dire, que si vous n'avez pas payé pendant 6 mois votre cotisation, non seulement vous allez devoir payer les 6 mois, mais en plus de cela, vous allez attendre 3 mois avant de bénéficier du régime. Et donc si pendant ces 3 mois, vous avez un imprévu et vous avez une grosse dépense de santé, vous ne serez pas couvert parce que vous n'avez pas été régulier dans votre cotisation.

C'est une disposition importante. J'appelle à ce que les gens comprennent l'importance de payer leur cotisation, non seulement globalement pour le régime, mais également pour eux, parce qu'on n'est jamais à l'abri d'un imprévu.

La deuxième mesure que nous avons introduite, c'est une amnistie sur les impayés. L'objectif est d'effacer le passé et d'inciter les gens à commencer une nouvelle page. 

Il y a aussi une autre mesure, c'est celle de conditionner toutes les aides et/ou subventions publiques à une autorisation de régularité vis-à-vis de la CNSS.

Au-delà de cela, nous allons évidemment corser nos moyens de recouvrement. Par ailleurs, il y a un projet en discussion pour que la CNSS puisse disposer de l'instrument de l'ATD (Avis à tiers détenteur) qui pourra nous donner de l'agilité, qui nous permet un recouvrement à moindres frais.

- Dans les TNS, il y a des travailleurs saisonniers  notamment les agriculteurs, une importante population, dont les revenus ne sont pas stables sur l’année. En plus, leur activité est actuellement frappée par une crise majeure. Faudra-t-il porter un regard spécifique sur cette catégorie ?

- La saisonnalité, ça se gère. De plus, quand on parle des agriculteurs et des petits agriculteurs en particulier, nous parlons de cotisations qui sont aux alentours de 150 dirhams pour une grande partie d'entre eux. Or, malgré cette crise ou la saisonnalité de leur activité, ils paient leur recharge téléphonique, l'essence pour se déplacer, etc. Et puis, que se passera-t-il si ces gens-là sont frappés d'une maladie ? Ils devront débourser beaucoup plus que le montant de la cotisation.

Nous comprenons la situation, leurs conditions difficiles et cette crise sans précédent. C'est d'ailleurs l'une des raisons de la mise en place de l'amnistie. Effaçons le passé, commençons une nouvelle page.

Mais, encore une fois, compte tenu du niveau de cotisation, compte tenu du fait que c'est un vrai service qui est rendu à ces populations, nous estimons que c'est plus une question culturelle qu'une question financière.

 AMO Salarié dégage des excédents avec une cotisation moyenne de 1,6 x SMIG. On peut dire sans se tromper qu'à 1,3 ou 1,4 x SMIG, on pourra être équilibré dans les autres régimes

- Avec toutes ces contraintes, la question de la soutenabilité financière du régime AMO avec toutes ses composantes se pose... 

- Je pense que c'est un domaine où il faut avancer de manière prudente et ajuster en cas de besoin. L'historique dont nous disposons est celui de l'AMO des salariés. À ce jour, nous dégageons encore des excédents, ce qui est exceptionnel pour une assurance maladie. Nous dégageons encore à peu près 3 milliards de DH par an d'excédents et nous sommes à 44 milliards de DH de réserves.

Ce ne sera pas forcément le cas des autres régimes pour plusieurs raisons. D'abord, la base de cotisation n'est pas la même. L'AMO des salariés, on est à une base moyenne de cotisation de 1,6 x SMIG, quand pour les TNS, nous sommes uniquement à 0,9 x SMIG. C'est extrêmement bas. AMO Tadamon, nous sommes à une fois le SMIG.

Ce qu'on remarque actuellement avec un recul qui est assez long, c'est qu'à 1,6 x SMIG, on dégage des excédents. Et on a un taux de sinistralité qui est autour de 70%. On peut dire sans se tromper qu'à 1,3 ou 1,4 x SMIG, on pourra être équilibré. Si demain, il y a un delta, il ne sera pas énorme, même si la démographie n'est pas la même, c'est-à-dire que la population des travailleurs salariés est plus jeune en comparaison avec celle des travailleurs non salariés ou avec celle de l'AMO Tadamon. Malgré tout, il n'y aura pas d'énormes ajustements à faire.

La deuxième chose, et c'est là où il faut fournir des efforts, c'est la maîtrise des dépenses. C'est un volet important pour un régime d'assurance. Il s'agit à la fois de la maîtrise et de l'optimisation des coûts des médicaments, des coûts des actes. Il y a aussi la question de la prévention et de la prise en charge précoce, etc. Donc, il y a un investissement fort qui doit être fait sur ce volet par toutes les parties prenantes.

Et il y aura aussi des questions importantes, demain, sur les traitements innovants qui coûtent beaucoup plus cher. Il y aura des arbitrages à faire.

- Un mot sur la stratégie de placement...

- Les placements sont faits en grande partie sur les taux, c'est-à-dire à travers les OPCVM. Donc, de l'obligataire en grande partie. Nous avons  une petite partie sur les OPCVM diversifiés, mais ça reste très limité. Si on fait une répartition en termes d'allocations d'actifs, on doit être à 95% à peu près en taux et à 5% en actions. Nous verrons comment les choses vont évoluer par la suite. C'est une stratégie évolutive. Elle est dynamique en fonction des rendements.

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