ANALYSE. Le marché boursier marocain est-il réellement surévalué ?
Le 27 septembre, l'indice MASI (Moroccan All Shares Index) a franchi la barre des 14.449 points, enregistrant une progression cumulative de 49% par rapport à ses niveaux les plus bas, enregistrés en janvier 2023, soit une hausse marquée sur une période de 20 mois.
Selon une note d'Attijari Global Research (AGR), cette dynamique soulève des inquiétudes quant à une possible surévaluation du marché boursier marocain.
Les analystes d'AGR attribuent cette surévaluation à un écart significatif entre l'augmentation des cours boursiers et les bénéfices réalisés par les entreprises cotées. Certains secteurs, notamment le bâtiment et travaux publics (BTP), l’immobilier, l’agroalimentaire et les nouvelles technologies de l’information (NTI), sont particulièrement mis en avant pour ce déséquilibre.
À l’inverse, les secteurs tels que le ciment, la grande distribution, l’énergie, les mines et la santé présentent des valorisations jugées plus raisonnables et alignées avec leurs fondamentaux économiques.
Vers une correction du marché ?
Le marché boursier marocain semble illustrer l'hypothèse d'efficience informationnelle, selon laquelle les marchés intègrent rapidement les nouvelles informations, ajustant ainsi les prix en conséquence.
Dès le lendemain de la publication du rapport d'AGR, le marché a commencé à refléter son impact. D'autres facteurs peuvent bien évidemment être aussi à l'origine de le évolution du marché. Ceci dit, les données observées sont comme suit :
- Le 7 octobre, jour de la diffusion du rapport, la capitalisation du MASI atteignait 14.156,87 points.
- Le jour suivant, le 8 octobre, l’indice a clôturé en baisse à 14.019,63 points.
- La tendance baissière s’est poursuivie avec un point bas atteint le 16 octobre à 13.834,74 points,
- Un léger rebond a permis au MASI de repasser au-dessus des 14.000 points, s'établissant à 14.080,57 le 18 octobre. Une baisse minime a été enregistrée ce lundi, le MASI restant néanmoins au-dessus des 14.000 points.
Durant cette période, les baisses les plus marquées ont été observées dans les secteurs identifiés comme ayant un écart significatif entre valorisation et profits réels. En revanche, les entreprises dont la valorisation avait été qualifiée de raisonnable par la note ont vu leurs cours augmenter.
Bien que les fluctuations récentes aient pu indiquer une certaine réévaluation, il convient de souligner que la baisse reste modeste. Une correction majeure ne pourrait être affirmée que si cette tendance se prolongeait et s’accompagnait de reculs plus marqués. D’autant plus que, pour l’instant, le marché se maintient au-dessus du seuil symbolique des 14.000 points, reflétant une certaine résilience.
Les avis divergent
Interrogé par Médias24, un analyste en Equity estime que le marché est correctement valorisé. "La valorisation actuelle est tout à fait logique. La hausse récente reflète une demande accrue, en partie liée à l’organisation de la Coupe du monde et aux opportunités économiques qu’elle génère pour les entreprises cotées. On ne peut pas parler de surévaluation systématique des actions. Ce phénomène reflète la confiance des investisseurs dans les secteurs porteurs, notamment au vu des grands chantiers que le Maroc a entrepris et qui sont renforcés par les projets d'envergure associés à la Coupe du monde".
Les investisseurs achètent en misant sur le potentiel futur des entreprises, et non sur leurs performances immédiates
Dans le même sens, une spécialiste du marché financier nuance l'idée d'une surestimation généralisée.
"Le marché est en ligne avec ses fondamentaux. La hausse récente est un indicateur du véritable sens de l’investissement qui s’inscrit dans une perspective de long terme. Les investisseurs achètent en misant sur le potentiel futur des entreprises et non sur leurs performances immédiates. Il ne faut pas juger la valorisation d’un marché à un moment donné sans tenir compte de la demande anticipée et des perspectives de croissance future des entreprises".
Un autre spécialiste du marché partage l’avis des autres experts tout en se montrant plus optimiste quant à l’évolution future de l’indice MASI. "Il ne faut jamais évaluer la valeur actuelle d’un marché en se basant uniquement sur les profits immédiats. Si l’on souhaite juger ces profits, il est plus pertinent de les comparer à ceux de 2023, une année où la capitalisation du marché était particulièrement basse. En parlant du MASI, il est important de rappeler que la plus grande part de la capitalisation concerne les banques. Compte tenu des grands projets d'infrastructures et d'investissements en cours, ainsi que l'organisation prochaine de la Coupe d'Afrique des nations en 2025 et de la Coupe du monde en 2030 par le Maroc, il est évident que de nombreux projets verront le jour : infrastructures, investissements, crédits contractés, etc. Je suis convaincu que le marché franchira la barre des 15.000 points prochainement. Cela est tout à fait logique, car le Maroc est engagé dans de nombreux chantiers qui dynamiseront l’activité économique réelle et, par conséquent, les profits des entreprises cotées en bourse".
Bien que certains signaux laissent entrevoir une correction imminente du marché, les hausses récentes semblent davantage portées par le potentiel et l'anticipation des bénéfices futurs liés aux grands projets d'infrastructures et d'investissements au Maroc, notamment la Coupe d'Afrique des nations en 2025 et la Coupe du monde en 2030. Ces projets injectent un optimisme qui soutient les valorisations actuelles, malgré des écarts entre les cours boursiers et les profits réalisés à court terme.
Toutefois, si les projets venaient à être retardés ou si les perspectives économiques globales s’assombrissaient, le marché pourrait subir une correction plus marquée, particulièrement dans les secteurs concernés.
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