Ancien diplomate, docteur en sciences politiques.
Nervosité, impatience et dissonance : l’Algérie dans l’œil du cyclone diplomatique
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Le 5 novembre 2024 à 10h46
Modifié 5 novembre 2024 à 10h46À l'exemple récent d'Amar Ben Jamaa, ambassadeur de l'Algérie aux Nations unies, dont l'attitude en Conseil de sécurité a suscité une onde de choc médiatique et politique, le stress non maîtrisé s'affiche alors comme un symptôme d'isolement diplomatique et d'égarement stratégique. Une image puissante et, pour certains, symbolique d'une diplomatie prise dans l’étau de ses propres contradictions.
Le stress est dangereux. Dans le cas des individus, il est contrôlable. Dans celui des collectivités, il est variablement géré. Le contrôle du stress dépend de la capacité de celui qui en souffre à réaliser son ampleur et le risque qu’il court s’il ne fait pas l’effort idoine pour y mettre fin.
Or, le stress est autrement plus préoccupant quand il est détecté chez des décideurs politiques, dont des chefs d’État, des ministres des Affaires étrangères ou des représentants diplomatiques. Des études sur le stress en politique étrangère sont abondantes (Holsti Ole R. & Alexander L. Georges, Political Sciences Annals, Vol. 6, 1975, p. 275).
L’image qui a circulé le 31 octobre 2024 sur tous les supports médiatiques en Afrique du Nord et dans le monde, où l’on voit Amar Ben Jamaa, ambassadeur représentant permanent de l’Algérie aux Nations unies, vociférer devant ses collègues au sein du Conseil de sécurité, ne sera pas oubliée de sitôt. Non pas en raison de son impact sur la pratique onusienne en matière de résolution de conflits, mais en raison de son caractère absurde, injustifié et gratuitement ostentatoire.
Le représentant algérien s’est enfermé dans une logique de déni qui frôle la cécité totale en matière de lecture des changements qui sont en train de se produire sur l’échiquier géopolitique et diplomatique régional et international.
Des parrains portés disparus
Un comportement d’autant plus surprenant que pendant son intervention, il est interrompu par l’un de ses collaborateurs qui lui tend son smartphone, qu’il consulte fictivement et marque une pause comme s’il voulait assimiler les instructions qui lui auraient été données en provenance de la capitale.
Un état de panique attestant de la perte de la boussole politique, de la syncope s’emparant de lui, qui témoigne du fait qu’il n’est pas conscient que l’enceinte dans laquelle il s’exprime est la plus importante en matière de gestion des conflits internationaux.
Le représentant algérien s’est trouvé dans une situation de déni qui l’a poussé à adopter une position de défi en s’attaquant aux États-Unis et à la France. Sans doute, inconsciemment, aurait-il voulu rééditer les précédents de Nikita Khrouchtchev, chef de gouvernement de l'URSS, le 23 septembre 1960, qui s’est mis à frapper le pupitre à l'Assemblée générale des Nations unies à l'aide de sa chaussure en vue de s'octroyer le droit à la parole.
Une image immortalisée à l'aune de la Guerre froide, au lendemain de la Guerre d'Indochine (1946-1954), en pleine Guerre du Viêtnam (1955-1975) et de la crise de Berlin (1958-1963) entraînant la division de la ville entre l'Est et l'Ouest.
Ou peut-être songeait-il à cette phrase laconique mais pleine de signification politico-idéologique du général Charles de Gaulle lancée le 10 septembre 1960 à propos de la guerre du Congo : "Ce machin qu'on appelle l'ONU". Le général de Gaulle épinglait les Nations unies pour avoir osé dicter leur volonté aux puissances victorieuses de la Deuxième Guerre mondiale.
À moins qu'il ne pensât à Mouammar Kadhafi qui, à l'occasion de son discours devant l'Assemblée générale des Nations unies en septembre 2009, se prend à vilipender l'Organisation en lisant aléatoirement quelques articles de sa Charte avant de la jeter en signe de mépris et d'insouciance.
Or, ces exemples se sont inscrits dans une mise en scène devant l’Assemblée générale des Nations unies qui sont restés sans lendemain dans la mesure où cette enceinte ressemble à une sorte de chambre d’enregistrement ou à un marché aux puces sans pouvoir d’exécution. Il en est autrement du Conseil de Sécurité. Le défi du Représentant algérien s’est déroulé au sein de cette instance mythique, caméléonne et intraitable si offense lui est faite par des membres non permanent dont la capacité de marchandage est presque nulle.
Un comportement inacceptable doublé d’une forme d’injonction aux États-Unis et à la France d’avoir opté pour la raison sur la voie de la résolution d’un conflit artificiel autour du Sahara sur la base du réalisme et de la dynamique enclenchée depuis 2007. S’attaquer à la France, l’accusant d’avoir adopté une approche mercantile en se positionnant avec le Maroc, n’est autre qu’un coup de pied gauche dans un guêpier.
Il s’agit plus d’une réaction intempestive, vite oubliée. L’Algérie est consciente d’avoir été abandonnée par un parrain qui ne s’offusque pas de lui rappeler qu’elle avait été créée seulement en 1962 à la suite d’un référendum en trois temps et d’une subordination implicite qui dure à ce jour, en vertu des dispositions des accords d’Evian. C’est pourquoi le président algérien Abdelmajid Tebboune était allé à Moscou en 2023 pour, apparemment, plaider la cause de son pays en vue d’adhérer aux BRICS, mais, en fait, pour quémander la protection de la Russie.
Le président algérien n’a pas hésité à qualifier la Russie de protecteur idoine et son président, Vladimir Poutine, d’ami de l’humanité ; ce qui a provoqué le sourire narquois de ce dernier. Trahie dans son dévouement à jouer le rôle de figurant, l’Algérie voit rouge. C’est comme si on entendait les dirigeants algériens répéter à l’unisson : "Le parrain est mort, vive le parrain!" Cependant, les parrains, selon la perception traditionnelle de l’interdépendance unilatérale –pour ne pas dire de suzeraineté appliquée– ne se bousculent pas devant le perron d’une Algérie blessée dans son amour propre et désormais impuissante à redorer son blason.
En effet, le parrain est mort, vive le parrain. Hier, la France, aujourd’hui la Russie. Le fait de vouloir introduire la question des droits de l’Homme dans la mission de la Minurso par le représentant algérien dans le projet de résolution 2756 (2024) sur le Sahara dénote d’une mémoire amnésique de tout un système politique qui s’empêtre dans l’hallucination.
Amar Ben Jamaa a feint d’oublier qu’en 2013, les États-Unis avaient miroité l’idée d’introduire cette dimension et y ont renoncé suite au refus du Maroc et à l’opposition farouche de la Russie et de la Chine. Ces deux pays y ont vu une machination que les États-Unis utiliseraient contre eux en évoquant la situation des droits de l’Homme dans le Caucase du Nord, au Tibet ou dans la province de Xinjiang qui compte une majorité de populations musulmanes.
L’Algérie peine à digérer son réveil cauchemardesque d’avoir tout perdu au change. Cette assurance qu’elle avait affichée durant les années 1970 comme étant la championne des causes dites justes en pleine Guerre froide est aujourd’hui froissée, déchiquetée, jetée sur le sentier du réalisme politique que consacre un système international en transition.
La fin hypothétique de la Guerre froide a fait sortir les chats de gouttière de leurs cachettes. Aujourd’hui, l’Algérie est exposée à une sorte de malédiction à double visage. D’une part, l’érosion du narratif révolutionnaire qui ne recueille plus de suffrage nulle part. D’autre part, le risque d’une implosion intranationale qui ferait l’effet d’une lame de fond qui remporterait tout sur son passage. En somme, l’Algérie n’est plus qu’un géant aux pieds d’argile.
Les cinéphiles arabes se rappellent sans doute le film Al-Halfout الهلفوت 1984, dans lequel Adil Imam joue le rôle de porteur (handyman). Il y a une scène qui résume l’idée géniale du réalisateur, Samir Sayf, dans laquelle Imam passe devant la maison d’un individu (Salah Kabil), personnage insupportable qui intimide les populations du village en comptant sur sa force musculaire.
Imam découvre qu’il n’en est rien et que la musculation dont ce personnage se vante est constituée de bandages et d’accessoires vestimentaires d’occasion. Abasourdi au début, il décide de se mesurer à lui. Une altercation suivie de la mort de ce pantin de héros victime d’une crise cardiaque. Le chapitre de l’hégémonie sur le village est fermé. C’est ce qui, semble-t-il, arrive à l’Algérie.
Toutefois, au lieu de faire la lecture idoine et de tourner la page de la tentation hégémonique qu’elle entend imposer dans la région, l’Algérie s’enferme dans le monde illusoire de la puissance factice. Un comportement qui rappelle le roman Don Quixote de la Mancha, de Miguel de Cervantès Saavedra (publié en deux parties en 1605 et 1615) ; une parodie sur l’idéal chevaleresque et la perte des repères existentiels d’adaptation et d’intégration dans la société médiévale.
La fuite en avant dans toute sa superbe
Ce comportement rappelle également les héros du film de Moumen Smihi (Chroniques marocaines, 1999). Dans le film, il y a une scène vers la fin dans laquelle on voit un pécheur de Tanger (rôle joué par Miloud Habachi) faire laborieusement ses préparatifs pour aller en mer. Il défie les autres pécheurs qui se moquent de lui parce qu’il prétend qu’il peut trouver un trésor caché dans le ventre d’un monstre marin.
La scène décrit le pécheur à bord de sa petite embarcation arborant un javelot de fortune et se dirigeant droit vers un bateau, le prenant pour le monstre recherché en vue de l’abattre et de dégager le trésor tant convoité. La scène reprend d’une manière subtile l’idée des moulins à vent contenue dans l’œuvre de Cervantès.
Ces deux exemples peuvent également être appliqués à l’Algérie qui meurt d’envie de mettre la main sur les trésors du Sahara marocain et d’avoir un accès sur l’Atlantique, en utilisant un monstre-illusion, le polisario.
Tanger, qui rappelle le rêve maghrébin à l’occasion de la réunion des partis de l’Istiqlal du Maroc, du Destour de Tunisie et du Front de Libération nationale d’Algérie en 1958. Tanger, par où passera le gazoduc Afrique-Atlantique vers l’Europe. Tanger qui verra sans doute la réalisation du projet de liaison fixe entre l’Afrique et l’Europe. Tanger qui a été témoin de l’attitude hostile de l’Algérie, à la suite de la tension au sujet de l’îlot de Leila (Persil) entre le Maroc et l’Espagne (juillet 2002); les décideurs algériens s’étant précipités pour signer le Traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération avec le pays ibérique, en contrepartie de la continuation par ce dernier de son opposition au Maroc sur le Sahara.
Ironie du sort, une fois l’Espagne a épousé la thèse marocaine en 2022, l’Algérie suspend ce traité en attendant des lendemains meilleurs. L’attente sera longue et risque de faire éclater le miroir aux alouettes que les décideurs algériens ont utilisé pour jouer la diversion et dont le reflet n’a plus d’impact.
L’illusion, c’est aussi cette photo fade et insipide dans laquelle on voit, la physionomie ramassée, les chefs d’État d’Algérie, de Tunisie, de Libye et de Mauritanie à côté du chef de la pseudo-rasd et du chef d’État-major de l’Armée algérienne à l’occasion de la célébration du 70e anniversaire du déclenchement de la guerre d’indépendance de l’Algérie (1954).
L’illusion dans toute sa superbe après une série de déceptions –pour ne pas dire de défaites– diplomatiques d’une Algérie qui, à force de courir après la rente mémorielle, a fini par sombrer dans l’amnésie identitaire. Amnésie, mais aussi fuite en avant pour constituer un nouveau Maghreb sans le Maroc. La nostalgie d’un âge d’or qui n’a jamais existé ni dans l’absolu, ni dans le relatif.
Comble d’ironie, là aussi, car au moment où la photo est prise (le 1er novembre 2024), une réunion ministérielle des ministres de l’énergie des pays membres de la CEDEAO (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest) est ouverte à Abuja dont l’un des points à l’ordre du jour est le projet de gazoduc Afrique-Atlantique. Le Maroc et la Mauritanie y participent.
Ce projet gigantesque (étalé sur 6.000 km) ambitionne de réaliser l’intégration régionale au profit d’une population estimée à 400 millions d’individus par le codéveloppement, l’approche gagnant-gagnant et l’inclusion communautaire de treize pays.
Question d’image encore ! Que retiendrions-nous de la scène du diplomate algérien du 31 octobre 2024 ? Sans ironie, ni légèreté, on peut tirer une série de conséquences que l’on peut décliner comme suit.
Un : Ce comportement aura des conséquences graves sur la politique étrangère algérienne. L’aspiration de l’Algérie à se porter candidate au poste de membre permanent du Conseil de sécurité pour la région de l’Afrique en cas de mise en œuvre de la réforme du Conseil de sécurité de l’ONU est non seulement compromise, elle a déjà rejoint le musée de l’histoire.
Deux : Le regain par l’Algérie de sa crédibilité au sein des organisations internationales et régionales ne sera plus, non plus, pour demain. Faisant de la question du Sahara marocain son cheval de Troie, en négligeant les autres dossiers qu’elle est censée défendre en tant que membre non-permanent du Conseil de sécurité (2024-2025), l’Algérie devient (que mes amis algériens m’en excusent) comme un chameau galeux (البعير الأجرب) ; tout le monde prend garde de ne pas s’y approcher.
À défaut d’axes, la terre brûlée
Trois : La fixation que l’Algérie se fait sur le Sahara marocain finira par la prolonger dans un état de déni de la réalité géopolitique et la renvoyer dans les turbulences d’un passé colonial qu’elle tente par tous les moyens de gommer de sa mémoire collective.
Quatre : La réaffirmation de l’enterrement définitif de l’idée du partage du Sahara marocain déjà consacrée en 2002, ainsi que l’abandon de l’idée du référendum sonnent le glas d’une diplomatie qui marche à reculons en se donnant l’illusion de marcher droit.
Cinq : Le risque que porte le principe du droit à l’autodétermination inscrit en lettres d’or dans la nouvelle constitution algérienne adoptée en 2020 sur l’unité du pays. L’arroseur arrosé, comme pourrait souffler un cynique politicien. Ce principe est déjà utilisé par le Mouvement d’autodétermination de Kabylie (MAK) et le sera aussi par la rébellion touarègue au sud du pays.
Six : La hantise la plus sérieuse qui habite l’entendement des décideurs algériens est le sort du polisario qui ne semble pas savoir où donner de la tête. Le mouvement séparatiste n’a de choix que de rester indéfiniment à Tindouf. Le pari sur le nord de la Mauritanie comme foyer de substitution est une chimère qui ni la Mauritanie, ni ses alliés dans la région et en Europe ne pourront tolérer.
Le polisario dispose d’ébauches de structures étatiques imposables au seul État algérien sur un territoire soumis aux dispositions de l’accord frontalier entre l’Algérie et le Maroc signé en 1972, que la première viole par des agissements à la fois belliqueux et infantiles.
Déjà, des voix émanant de certaines composantes polisariennes, conscientes que la question du Sahara est réglée en faveur du Maroc, intègrent dans leur réflexion l’éventualité de prendre Tindouf comme base pour "un État", qu’il soit reconnu ou pas par la communauté internationale.
Sept : Le défi lancé par l’Algérie à l’endroit de la France et des États-Unis est un comportement suicidaire. La France détient des archives sur l’histoire de l’Algérie depuis son occupation en 1830. Elle détient surtout les documents compromettants sur les tractations entre les dirigeants du FLN algérien et l’ancienne Métrople au lendemain du déclenchement de la guerre de libération en 1954, que l’Algérie a célébrée en pompe il y a quelques jours.
Pour sa part, les États-Unis détiennent des archives sur les subterfuges que l’Algérie a utilisés lors de sa médiation pour la libération de cinquante-deux diplomates et civils américains à l’ambassade américaine à Téhéran (1979-1981) ainsi que sur les méthodes peu orthodoxes que l’Algérie a utilisées pour exercer des pressions sur Washington pour qu’il s’aligne sur sa position au sujet du Sahara marocain.
C’était à cette époque que l’administration Carter (1977-1981) avait décrété un embargo sur la vente d’armes au Maroc. Ce dernier se trouvant dans une situation délicate dans sa guerre contre les séparatistes du polisario bien entrainés aux techniques de la guérilla et armés de belle manière par la Libye, l’Algérie et certains pays européens de l’Est aidés par des conseillers cubains.
Huit : Les décideurs algériens voguent sur une autre orbite. Ils sont invités à méditer les études sur la relation entre la dimension psychologique et le système de prise de décision en politique étrangère. Samuel Kirkpatrick A. "Psychological Views of Decision Making", in Political Sciences Annals, Vol. 6, 1975, pp. 39-113). Un exercice qui serait à même de leur faire éviter d’être la risée des planificateurs politiques et militaires étrangers.
Neuf : Les décideurs algériens ont, depuis l’indépendance en 1962, presque tout réussi dans l’échec. La question des frontières va finir par faire imploser l’Algérie. Les pays voisins, qui ont été contraints de signer des accords frontaliers avec l’Algérie en 1983, se rendent compte que ce pays est un ballon gonflé de narcissisme politique sans impact sur la réalité du terrain. De même, c’est un pays qui défie les Nations unies, à l’image de cette performance cavalière de son représentant permanent aux Nations unies, le 31 octobre 2024.
Dix : Les décideurs algériens ont cultivé une perception hégémonique des relations qu’ils ont entendues avoir avec leurs voisins. Ils ne récoltent désormais que du vent. S’agissant du Maroc, le comportement de ces décideurs a participé indirectement à l’accélération du processus démocratique au Maroc, notamment après les deux guerres que l’Algérie lui a livrées à Amgala en 1976.
Onze : L’hostilité de l’Algérie a permis au Maroc de moderniser son armée, de répondre graduellement et en fonction des moyens, aux attentes sociales et politiques des Marocains et d’enraciner la conscience d’appartenance nationale sur la voie de la confirmation de son indépendance totale.
Douze : L’Algérie se devrait de se mordre les doigts d’avoir été élue au Conseil de sécurité des Nations unies pour les années 2024-2025 à un moment où la question des Provinces du Sud est sur la voie de connaître son épilogue. L’assurance de façade qu’elle affichait au lendemain de son élection, présentée comme une victoire céleste, s’est convertie dans une tirade de lamentations pour faire porter le chapeau à deux membres permanents du Conseil de sécurité, accusant le premier de mercantile voire opportuniste, comme si la diplomatie était une affaire de samaritains, et le deuxième de cachotier et de caméléon.
Le syndrome du soleil qui se lève de l’ouest
Treize : Les décideurs algériens ont cependant droit à deux satisfactions. La première satisfaction est d’avoir ancré, depuis 2020, dans l’entendement de la majorité des Algériens que le Maroc est un ennemi éternel. Même les Algériens qui se réclament de l’opposition (à quelques exceptions près) ont affiché une mine de détresse à la suite de la confirmation par la France de sa reconnaissance de la marocanité du Sahara et de l’adoption de la résolution 2756 (2024) par le Conseil de sécurité des Nations unies, le 31 octobre 2024.
La deuxième satisfaction est d’avoir démasqué une minorité de Marocains qui ont une allégeance transnationale qu’ils sacralisent au détriment de leur allégeance à leur pays. Ils le font bien que conscients que le référentiel idéologique et politique qu’ils vénèrent est susceptible de porter atteinte aux intérêts existentiels du Maroc.
Quatorze : Il serait à craindre que la folie des grandeurs, le refus d’accepter la réalité et l’absence d’alternatives ne poussent les décideurs algériens à opter pour le terrorisme afin de déstabiliser le Maroc, comme ils ont essayé de le faire en 1994 à travers l’attaque de l’hôtel Asni à Marrakech.
Quinze : Une avant-première de cette intention a été la diffusion par un journal gouvernemental algérien d’un communiqué fabriqué de toutes pièces attribué au ministère des Affaires étrangères français mettant en garde les ressortissants français de se rendre au Maroc à cause des risques d’attentats terroristes.
Seize : Comble de l’hérésie, car la publication de ce pseudo-communiqué a eu lieu alors que le Président français (et une forte délégation ministérielle et d’hommes d’affaires) se trouvait à Rabat dans le cadre de la visite d’État qu’il effectuait au Maroc. La réponse a été la diffusion d’images montrant le Président Macron et sa délégation en train de déguster en plein air des plats succulents de la gastronomie marocaine.
Au demeurant, l’Algérie et la schizophrénie, pour reprendre une description chère à Abdellah Laroui, se plaisent à jouer la diversion. Les décideurs algériens tentent de duper les observateurs et les analyses politiques et militaires. Lors du défilé militaire organisé le 1er novembre 2024, ils font défiler des armements attrapés par l’âge et la rouille comme pour induire tout le monde en erreur.
Un guet-apens pour le Maroc pour lui faire croire qu’en cas d’une guerre que l’Algérie déclencherait, il aurait une grande chance de la remporter en une fraction de jours. À moins que l’objectif ne fût de justifier le budget de 25 milliards USD que l’institution militaire s’est fait alloué pour embarquer dans une course folle aux armements avec le Maroc.
Une autre tentative de diversion est celle qui consiste à accréditer l’idée que le Maghreb comprend cinq pays, mais sans le Maroc (remplacé par la pseudo-rasd), dont la photo de famille mentionnée plus haut serait l’illustration par excellence. C’est sans compter sur la sagesse des Libyens et des Mauritaniens.
Une manœuvre infantile dans la mesure où, selon certains satiristes politiques et diplomatiques, la même photo présente des anomalies criardes : un pays avec deux présidents (l’Algérie), un chef de gouvernement contrôlant seulement une partie de son pays (la Libye), un président piégé parce qu’il tente de maintenir un certain équilibre dans ses relations avec les acteurs majeurs dans la région (la Mauritanie) et un président d’une entité autoproclamée-État élisant domicile sur le territoire d’un autre Etat (la pseudo-rasd).
Plus agressives encore sont les mauvaises langues qui observent que l’Algérie aurait trois présidents si on y ajoute le dirigeant du Mouvement pour l’autodétermination de la Kabylie (MAK).
Plaisanterie mise à part, l’Algérie se trouve dans une situation inconfortable. L’année prochaine, à l’occasion de la célébration du 71e anniversaire du déclenchement de la guerre de libération nationale, bien de choses auront changé en ce qui concerne les structures institutionnelles du pays.
La dualité du pouvoir, sous une forme de taqîa à l’algérienne, devrait cesser ou être mise en sourdine pour éviter la reproduction de cette scène au sein du ministère de la défense où l’on voit le chef de l’État-major des armées, Said Chengriha, prendre le siège du Président Tebboune et l’acculer à s’asseoir à sa droite et le premier ministre à sa gauche. Un message clair que c’est l’institution militaire qui dirige le pays.
Sur le plan international, l’Algérie risque de se trouver seule à méditer la réplique de Meursault, héros du roman L’Étranger d’Albert Camus (1942) quand on lui a demandé pourquoi il avait tué l’Arabe sur la plage. Sa réponse a été on ne peut plus absurde et surprenante. Il l’aurait tué à cause du soleil et de la chaleur étouffante. Si par hasard, on posait la question aux décideurs algériens sur leur casse-tête diplomatique tel que manifesté depuis six ans au moins, on risquerait d’avoir la réponse suivante : "c’est à cause du soleil qui se lève de l’ouest". De l’absurde à l’hérésie, il n’y a qu’un pas.
Ce pas nonchalant est visible depuis cette débandade du représentant permanant de l’Algérie au sein du Conseil de sécurité des Nations unies. L’Algérie a tué ce qui lui était resté de crédible et de raisonnable en s’enfermant dans le déni et le refus d’accepter que la question du Sahara marocain est sur le point d’être définitivement résolue. Se déguerpir pour ne pas voter la résolution 2756 (2024), le 31 octobre 2024, n’arrêtera pas le train en marche d’un Maroc qui évolue avec la force tranquille et la vigilance en apothéose.
Il arrivera dans un futur proche que le seul souvenir de cette longue pièce de théâtre insipide qui date de bientôt cinquante ans serait des mémoires écrites par d’anciens représentants personnels du Secrétaire général des Nations unies, rongés par le sentiment d’avoir échoué à triompher du Maroc ou de l’acculer à marchander sinon à brader sa souveraineté.
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